Chantonnant, j'étais sortie de chez moi après avoir prévenu papa que j'allais faire des photos dans la forêt. Bon, je pense que j'ai du chemin à faire, il vaut mieux prendre mon vélo pour y aller. Vêtue de façon à représenter le personnage de Black rock shooter, je vérifiais que je n'avais rien oublié avant de partir. Appareil photo prêt et chargé, trépied télescopique présent et carde SD vide. Nickel. Je chevauchais mon VTT et m'en allais tranquillement. J'en aurais sûrement pour la nuit ou du moins une bonne partie. Le truc c'est que j'ai école demain, je ne peux pas me permettre d'être en retard ... quoique on s'en fout ! S'il faut je dormirai en classe. La nuit est belle et les étoiles présentes sous cette couverture des ténèbres, brillent de milles feux mais dommage, mon appareil n'est pas assez puissant pour les chopper. Je remarque que la ville est calme ce soir, pas de jeunes universitaires pour faire la fête, pas d'ivrogne au coin de la rue, ... en fait il n'y a pas grand monde mise à part quelques voitures passagères. J'atteignais ensuite la forêt, mais un frisson me parcourait en voyant ces arbres. Je ne sais pas pourquoi cela me fait si peur d'entrer dans ces bois. Devrais-je croire aux esprits depuis que je me sais être une kitsune ? Ou au contraire, devrais-je réprimer cette idée tout comme je l'ai fais avec mes pouvoirs ?

C'est anxieuse et d'un pas lent que j'entrais dans le bois après avoir mis la béquille à mon vélo. Je sortais mon appareil photo de mon sac en bandoulière et le préparais tout en m'éloignant de l'entrée. « Allez, courage, y a personne, c'est plutôt bon signe. Par pitié faites qu'il n'y ait pas de taré dans ce bois. » Je soupirais en décontractant mes épaules. J'observais les environs et je décidais de me poser au beau milieu de ce nulle part, entre quatre arbres. La peur au ventre, j'installais mon matériel tout en configurant les divers trucs par-ci par-là. Hop tout est prêt ! Je n'avais plus qu'à prendre la pose devant mon objectif, mais alors que je commençais tout juste à me détendre, j'entendais un bruit qui me fit redevenir nerveuse. J'ai pourtant vérifié à deux fois qu'il n'y avait personne... « Mais merde, ce lieu fait trop flipper !! Heureusement que j'ai pas choisi le cimetière !! ... Bon... Rationalisons. C'est sans doute un hibou ou une chauve-souris... Quoique ça craque pas les branches au sol... Un animal à quatre pattes ? » De plus en plus de bruits autour de moi et une odeur étrange de plus en plus présente. Cela ne pourrait pas être une remontée d'égout en plein milieu du bois, mais ça pue tout autant. J'ai aussitôt sauté sur mon appareil pour le mettre en mode vidéo et flash constant afin de vérifier autour de moi. « Qui est là ?! J'ai un taser ! Montrez-vous ! » Le coup du taser, c'est carrément du bluff. Mais j'en profitais pour ranger mon trépied. Je crois que ce n'est pas le soir d'être une gentille petite fille qui joue avec son appareil photo.

Je tournais, je cherchais, je m'aventurais lentement et je ne voyais rien ni personne. C'est carrément étrange ! Flippée, je décidais de rebrousser chemin et de rentrer à la maison mais maladroite comme j'étais, je me suis empiergée le pied dans une racine d'arbre et boom. Je me retrouvais couchée au sol dans ces feuilles mortes humides et sans la moindre lumière. Mon appareil photo venait sans doute de s'abîmer dans la chute et je le rangeais automatiquement. Hélas, je crois que j'ai oublié mon portable à la maison. Je me relevais alors très vite et je me suis mise à courir là où je pouvais pour retrouver mon vélo. La panique me faisait faire n'importe quoi, j'avais bien trop peur pour être rationnelle à ce moment mais au moins je m'étais éloignée de l'odeur bizarre, c'était déjà ça. En sortant du bois, je constatais que le vélo n'était pas là, alors soit je m'étais trompée de chemin, soit mon vélo venait d'être volé mais je penchais pour la première hypothèse et dans la panique je m'en allais en courant, tant pis pour mon vélo je reviendrai le chercher plus tard.

J'étais essoufflée d'avoir couru si vite, mais également bouleversée. C'est comme si un taré avait failli me sauter dessus dans le bois, j'ai eu si peur que j'aurais pu m'en uriner dessus. Heureusement cela n'est pas arrivé mais je suis couverte de salissures depuis que je suis tombée. Soudain, au moment où j'allais abandonner l'idée de chercher mon vélo mais que j'allais continuer ma fuite, j'entendis une jolie voix féminine prononcer ce nom très familier à mes oreilles. « Black rock shooter ? » Instinctivement, je me suis stoppée nette dans mon élan et je me suis retournée gentiment. « Quoi ? » J'étais aussitôt face à une jeune personne, une jeune femme qui devait avoir environ deux ou trois ans de plus que moi à tout casser.

L'entendre être aussi cultivée sur le moment avait le don d'apaiser ma peur panique et m'empêcher de continuer cette cavale. Elle avait fait apparaître un sourire sur mon visage, mais ce sourire disparaissait lorsque j'apercevais qu'elle avait pleuré. J'affichais à présent un air légèrement inquiet sur mon visage. Et ses cheveux... qu'est-ce qu'elle fait là en pyjama ?! Mais je n'ai pas eu le temps de poser cette question car elle y répondait automatiquement, me signifiant qu'elle était somnambule et perdue en plus de cela. Non, décidément, je ne peux pas la laisser ici ! J'ai beau avoir peur de cette forêt, honnêtement, je préfère fuir à deux plutôt que seule. La demoiselle me propose son écharpe et se présente sous le prénom de Nila. À mon tour d'ouvrir la bouche, je m'approchais d'abord gentiment d'elle. « Moi c'est Mayu. C'est à moi de te demander si tu n'as pas froid ! Je t'en prie, garde ton écharpe. Qu'est-il arrivé à tes cheveux ? » Après cette question, je me mis à réfléchir un court instant.

C'est tout de même étrange, est-ce que c'est elle qui m'a fait courir à travers ces arbres ? J'aurai pourtant juré être seule avant qu'elle n'arrive. J'ai pourtant vérifié plusieurs fois s'il y avait quelqu'un et je n'avais vu personne. Là je me retourne et elle est là, comme sortant de son lit. Nom de dieu, ne me dis pas qu'elle dormait là dans les feuilles mortes et ce froid mordant ?! C'est impensable et flippant à la fois. Que pourrais-je bien lui dire ? Ce lieu est trop inquiétant, on ne devrait pas rester ici. Je m'approchais encore d'elle gentiment et je lui prenais les mains avant de lui enlever une brindille des mèches de cheveux. « Ne restons pas là, j'ai entendu des bruits bizarres là-bas... Tu veux que je te raccompagne chez toi ? Tu vas attraper froid ici. »

Est-ce moi ou bien ma peur panique vient soudain de paraître comme si ça faisait plusieurs mois que j'étais là à la regarder ?! Cette inquiétude d'être encerclée par des tarés ou des animaux sauvages vient soudain de disparaître et j'ignore totalement comment j'en suis arrivée à me sentir aussi soulagée d'un coup ! Je me sens bizarre. Cette situation est étrange. On en est déjà à parler de s'échanger nos vêtements, à se tutoyer, à se prénommer et faire copine copine. J'ai eu un décalage. Une sorte d'absence mentale qui n'a duré que quelques secondes mais qui m'a paru une éternité, et ça m'a fait comme un vertige lorsque je suis revenue à la réalité pour me rendre compte que ma trouille s'était volatilisée en un instant. Après avoir écouté ce qu'elle disait sur deux animaux, je détournais délicatement mon regard, feintant ne rien ressentir alors que j'étais à la limite de vomir en imaginant cette affreuse scène qu'elle venait de décrire. Je cherchais mon vélo à droite, puis à gauche... mais je ne le voyais toujours pas. Bon bah tant pis. Devenons un chaperon piéton pour la demoiselle et raccompagnons-la à son domicile. Toutefois je m'abstiendrai de lui faire des remarques sur sa description chargée concernant la chaîne alimentaire. Beurk quand même.

« Bon bah au moins je suis au courant que tu es somnambule, je m'inquiéterai peut-être moins la prochaine fois que je te croiserai presque nue en pleine nuit dans la rue. Hahaha. » L'humour marchera-t-il à cette heure ? Surtout avec les bruits suspects qu'on a croisé tantôt. Elle acceptait de me suivre pour que je la raccompagne, mais juste un bout, elle est sérieuse ? Eh bien, elle n'a pas froid aux yeux, c'est le moins qu'on puisse dire. Personnellement, j'aurais peur de me réveiller au cœur d'une forêt entourée d'animaux affamés et sauvages, ainsi que d'hommes saouls qui rodent dans les rues étroites, la nuit. Il peut tellement arriver n'importe quoi, est-elle insouciante à ce point-là ? Nous avancions, lentement. On prenait notre temps.

Soudain, après son regard insistant qui ne me dérangeait pas plus que cela, la jolie Nila en pyjama me fit un compliment, je suppose qu'elle est sincère même si je n'ai pas l'habitude d'être complimentée sur ce hobby. Je détournais encore une fois le regard, mais cette fois-ci, c'était différent. Je ne cherchais pas à cacher un dégoût mais plutôt à cacher mes joues rougies. Remarque dans la semi pénombre et sous ces lampadaires oranges qui n'éclairent pas grand chose, cela ne se verra peut-être pas ? « J... j-j-j-je... oui... C'est moi qui l'ai fais. Pardon, je suis pas habituée à ce que l'on complimente mes traits de couture. T'en dire plus sur ... le cosplay ? Bah euh... si tu veux oui, si tu as ta nuit à perdre sur mes déblatérations, sinon on peut en parler demain quand tu seras reposée, qu'en dis-tu ? »