Youth in innocence
Il y a des moments où le destin semble voué à n'être pas celui auquel on aspire. Ta vie a connu l'un de ces moments. Mais avant ça, tu as connu la paix et le bonheur dans une famille aimante. Née fille de professeur et de policier, tu as grandi avec des règles strictes. Cela ne t'a pas vraiment déplu même si, dès que tu franchissais le portail de la maison, tu devais une autre petite fille, pleine d'imprudence et de rêves. Ton imagination était débordante, trop au goût de tes parents. Seule ta maîtresse trouva que c'était une bonne chose. Il ne te fallait pas grand chose pour t'inventer tout un monde et les personnages qui allaient avec. Tu étais tour à tour un chevalier délivrant une princesse d'un dragon invisible, un Robin des bois un peu plus moderne ou encore un policier poursuivant un terrible criminel. La tour était souvent un arbre auquel tu grimpais sans crainte, le criminel un pauvre chat terrorisé.
Bien sûr, toutes ses aventures inquiétaient tes parents car, plus tu grandissais et plus tu prenais de risques. Heureusement, ton asthme était là pour refréner tes ardeurs par moment. Mais même lorsque les monstres légendaires et les voleurs imaginaires commencèrent à disparaitre, tu ne t'arrêtas pas de monter aux arbres pour autant. Tu aimais contempler le ciel ou simplement être tranquille à la cime des arbres. Tes prises étaient sûres, fluides et tu ne craignais pas la chute. Tu n'étais jamais tombée, alors pourquoi cela commencerait maintenant ?
A l'école, tu travaillais bien, ramenant autant de bonnes notes que tu le pouvais à la maison. Le sourire de tes parents devant cette réussite compensait tous les sermons reçus après être rentrée avec un énième pantalon déchiré. Mais, malgré les bonnes notes, tu n'arrivais pas vraiment à te faire des amis. Tu n'en avais pas besoin avec tous ceux que tu t'inventais. Les autres te trouvaient un peu bizarre mais tu t'en fichais. Jusqu'au jour où tu compris que tes amis imaginaires pouvaient disparaître à tout instant. Alors, tu commenças à t'ouvrir aux autres, avec méfiance tout d'abord. Cependant, il ne fallut pas longtemps pour que tu ne deviennes un véritable moulin à paroles avec quiconque acceptait une conversation avec toi.
Tu n'avais pas encore six ans lorsque ton chemin croisa pour la première fois le surnaturel. C'était dans les bois, un soir de pleine lune. A partir de là, il n'est pas difficile de deviner qu'elle fut cette expérience surnaturelle. Tu descendais de ton arbre un peu plus tard que d'habitude. C'était une nuit d'été, de celles dont la douceur ferait pâlir le printemps. Tu avais voulu contempler les étoiles. Mais il était temps de rentrer manger à présent. Ce fut en courant vers la maison en toute insouciance que tu remarquas les yeux luisants entre deux arbres et les dents tranchantes que le clair de lune faisaient apparaître. Tu ne bougeas pas, figée par la peur ou la surprise, c'était difficile à dire. De cet instant, tes parents ont réussi à te convaincre, toi la tête brûlée, que ce n'était que le fruit de ton imagination. Mais depuis, tu rêves en secret que les monstres des contes et des mythes soient réels.
A time to grow up
Heureusement, tu grandis et tu appris à te taire par moment même si cela restait difficile pour toi. Le jour où l'on te demanda ce que tu voulais faire, tu souris. Tu le savais depuis toujours d'après toi, depuis tes huit ans en réalité. Comme ton père avant toi, tu voulais mener des enquêtes, arrêter des criminels et aider les gens. Dès qu'ils l'apprirent, tes parents essayèrent de te mettre en garde. Entrer à l'école de police alors qu'on est asthmatique est presque impossible. Mais tu ne baissas pas les bras, ce n'était pas dans tes habitudes.
Quelques jours plus tard, lors d'un rendez-vous avec ton médecin, tu lui posas la question sans détour. Il te répondit que des traitements pouvaient peut-être améliorer ta condition mais qu'un miracle n'était pas non plus à attendre. Tu étais et serais toujours asthmatique. Mais l'idée te trottait toujours dans la tête. Et puis, un matin, tu décidas de tenter le coup malgré tout. Tu enfilas de quoi aller courir, pensant à ton traitement juste avant de partir, et tu t'élanças dans les rues de Beacon Hills. Tu réitéras tes séances de course à pied tous les deux jours, jusqu'à tenir une heure à un bon rythme. Tu intensifias ensuite ton entrainement, le diversifiant autant que possible. Mais le plus souvent, tu devais t'arrêter avant d'avoir fini car tes poumons n'avaient plus assez d'air.
Tu ne te démontas pas pour autant, aussi bancals soient tes résultats. Tu t'accrochais à ce fol espoir que, peut-être, c'était possible. Et c'est avec cette idée bien en tête que tu te présentas au concours dans ta dernière année de lycée. Tes parents ont tout essayé pour te faire changer d'avis mais difficile de faire plus têtue que toi. Tout commença bien. Jusqu'au huitième obstacle. Tu le sentis tout de suite. Asthmatique. Les instructeurs qui encadraient le concours ne mirent pas bien longtemps, eux non plus, à comprendre ce qui t'arrivait. On ne passait pas aussi subitement de la deuxième place à l'avant-dernière sans raison. Asthmatique. "O'Connell ! Arrêtez-vous et venez devant nous !" t'ordonna l'un d'eux. Ton coeur balançait entre obéir et continuer malgré tout, malgré la douleur. Mais tu te rendis à l'évidence, tu ne finirais pas le parcours. Tu allas donc te planter devant les instructeurs, le souffle court, la respiration sifflante. Et tu reçus la sentence sans un mot, sans un regard suppliant. C'était fini, ton rêve venait de voler en éclats. Maintenant, tu avais grandi. Maintenant, tu étais prête à vivre.
When dreams colapse faced with reality, you have to rebuild an entire life
Ce soir-là, tu grimpas dans l'arbre qui trônait au milieu du jardin de tes parents. C'était le premier que tu avais escaladé et tu aimais cette sensation de protection qu'il t'avait offert dès la première fois. Et, à ce moment, tu n'étais pas plus forte que cette petite fille qui avait manqué de tomber tant de fois lors de son ascension et qui tremblait comme une fille perchée sur sa branche. Allongée sur la plus grosse branche de l'arbre, tu contemplas le ciel pendant de longues minutes qui se transformèrent bientôt en heures. Là-haut, hors du monde, tu pouvais essayer de rêver à nouveau. Et tu y arrivas un peu.
Quelques mois plus tard, tu entras à l'université pour y suivre des cours de journalisme. Travailler n'était pas un souci pour toi et tu relevas tous les défis qu'on te proposa ou t'imposa. Tu avais déjà vu l'un de tes rêves se briser, il n'était pas question que cela recommence. Et cela ne recommença pas. Tu eus ton diplôme et tu trouvas un petit boulot dans le journal local. Ce n'était pas très bien payé mais cela te faisait de l'expérience.
Les années passèrent. Et puis tu en eus marre de cette impression de tourner en rond alors, lorsque ton patron te proposa de passer à temps partiel, tu acceptas et repris des études. En histoire pour essayer d'assouvir ta soif d'apprendre. Aussi, lorsque tu vis parmi tes options un cours de mythologie, tu sautas sur l'occasion. Tu te souvenais bien des quelques passages d'histoire romaine que t'avait enseigné ton professeur alors que tu n'avais pas dix ans. Et tu te lanças dans ces études corps et âme. Jusqu'au jour où, traînant autour du commissariat en espérant glaner quelques informations pour ton prochain article, tu surpris une conversation entre deux hommes qui ne devaient pas être bien plus vieux que toi.
C'est ainsi que tu rencontras des Believers pour la première fois. Ton imagination débordante alliée à ta curiosité dévorante ne te firent pas tenir plus de quelques heures face aux arguments des jeunes hommes. Tu te mis à y croire plus fort encore qu'avant cette rencontre parce que tu voulais déjà y croire avant même de les rencontrer. Que les créatures que tu as imaginé combattre ou être soient réelles était l'un de tes rêves refoulés. Alors, s'ils avaient raison, peut-être cela te ferait-il oublier la déception de l'école de police ? Sûre de ça, tu passas le peu de temps libre qu'il te restait à faire des recherches sur le sujet, en quête de cette preuve que tout Believer cherche à trouver.
Ce n'est que quelques mois plus tard que tu fis la rencontre de ton professeur de mythologie bien loin de sa salle de cours à l'université. Tu rôdais (encore et toujours) aux abords du commissariat. Mais cette fois, tu ne marchais pas au hasard dans l'espoir de glaner quelques informations quelles qu'elles soient. Le scénario était prêt de A à Z. Tu te remémoras chaque partie avec soin. Il n'allait plus tarder. Marcher vers lui le nez dans le journal du matin, lui rentrer dedans (in)volontairement, s'excuser, engager la conversation, lui poser plein de questions. Le plus important était de ne surtout pas oublier d'engager la conversation avant de l'interroger.
Tu avais établi ce plan quelques jours auparavant après qu'un nouveau cas étrange ait retenu ton attention. Tu n'ignorais rien de la collaboration d'Alexander Woodbury avec la police lors des affaires étranges qui agitaient (souvent) la ville. Alors autant essayer de lui tirer les vers du nez. Et tout se déroula comme tu l'espérais. A un détail près que le professeur de mythologie ne lâcha pas un seul mot. Tu dus te contenter de ses réponses évasives. Mais pas vexer pour un sous, tu te promis de remettre ça sur la table le plus tôt possible. Et pourquoi pas au prochain cours ? De toute façon, tu ne risquais rien à part qu'il finisse par abandonner et qu'il te donne quelque chose de tangible. Mais, au fil de tes conversations, tu lui posas de moins en moins de questions, prenant le temps d'apprécier sa compagnie. Toutefois, tu gardas soigneusement dans un coin de ton esprit l'espoir de le faire parler un jour. Qui sait ? Qui ne tente rien n'a rien.