Cela faisait à présent quelques jours que j'habitais chez Chris et Isaac. Heureusement parce qu'en arrivant à Beacon Hills, j'avais vraiment eu besoin d'un point de chute. Ce n'était pas encore le top du top avec Isaac. Je m'en doutais. Cela prendrait du temps. Il m'avait abandonnée et même si là, il disait qu'il ferait tout pour m'aider, je ne pouvais pas m'empêcher d'avoir peur qu'il me laisse tomber, qu'il parte encore une fois en me laissant seule derrière lui. Chris n'était toujours pas rentré. Je n'aimais pas trop savoir ça mais je savais aussi que Chris savait ce qu'il faisait. Quoi qu'il en soit, j'avais remplis le frigo et les placards de la maison typiquement masculine des deux hommes. Autant dire qu'il était temps et qu'ils en avaient bien besoin. Je n'avais pas vraiment mieux à faire de toute façon. Je sortais parfois mais je ne sortais jamais trop longtemps de peur que mes griffes poussent ou des dents pointues. Ce n'était pas simple pour moi de ne pas savoir ce que j'étais. Et j'avais cette peur de la prochaine pleine lune aussi... Qu'allais-je faire comme dégâts cette fois? J'étais assise sur le canapé à regarder la télé. Isaac était... J'en sais rien... A la fac sans doute. Ou avec sa bande d'amis... Un soupire s'échappa de ma bouche. J'entendis alors la porte d'entrée et sans savoir pourquoi, je cru que ça pouvait être Chris. Alors je me levai d'un bond pour aller voir. Je n'attendais pas Isaac avant encore un moment, d'après ce que j'avais compris il avait cours jusqu'à dix-sept heures. Pourtant, ce fut le visage d'Isaac que je vis. « Oh c'est toi. Je t'attendais pas alors j'ai pensé que ça pouvait être Chris.. » Je souris doucement. J'espérais vraiment qu'il allait bien, où qu'il soit et qu'importe avec qui il était. Je voulu retourner vers le salon quand Isaac attrapa mon poignet. « Tu viens avec moi. » Hein? Où ça? Il m'entraîna avec lui et refusa de répondre à mes questions. Je tentais de négocier, je n'avais pas très envie de sortir, mais rien à faire. Il m'obligea à le suivre. On arriva rapidement en forêt. « Je peux savoir ce qu'on fait en pleine forêt?! » Je croisai les bras sous ma poitrine, un peu fâchée qu'il m'ait obligée à venir ici sans rien m'expliquer. C'était bien Isaac ça. Mystérieux. Mais tellement attirant aussi...

C'était assez difficile de devenir une créature surnaturelle du jour au lendemain. Plus rien n'était sous son contrôle. Lorsque l'on se transformait à la pleine lune et qu'on perdait tout discernement, toute notion de réalité, on perdait le contrôle absolu sur soi-même. Et ce lâcher-prise était très dur à supporter parce que durant cette nuit là, on faisait des choses sans le réaliser et le lendemain, quand on comprenait ce qu'on avait fait, on avait la sensation d'avoir le coeur qui se brisait et tombait en miettes. Jamais je n'aurais fait de mal à qui que ce soit, alors quand le lendemain de ma première transformation, je m'étais réveillée couverte de sang et que j'avais compris que c'était moi qui avait tué toutes ces personnes, j'avais été malade. Alors oui, il était sûrement temps que j'apprenne à me contrôler. Parce qu'avoir des griffes qui sortaient et remplaçaient mes ongles naturels en pleine journée, au milieu d'une rue ou dans une petite boutique, ce n'était clairement pas l'idéal. Cependant, j'avais été surprise de voir Isaac rentrer et me donner l'ordre de venir avec lui. Je n'avais même pas vraiment eu le temps de résister. Malgré tout, une fois en forêt, je lui demandai des comptes. Je voulais savoir pourquoi il m'avait ramenée ici. « Je sais très bien que tu n’aimes pas vraiment ce nouveau statut et on ne peut rien faire pour revenir en arrière… Par contre, je peux t’aider avec tout ça… C’est le moindre que je puisse faire, après tout ! » Je détournai le regard. Je ne savais toujours pas contrôler ma nouvelle condition et je ne savais d'ailleurs toujours pas ce que j'étais exactement. Une louve? Une coyote? Autre chose? Je n'avais subis qu'une pleine lune jusqu'à présent et Isaac n'avait vu que mes griffes. Mais les loups ou les coyotes, ça a des griffes alors... Difficile de déterminer ma nouvelle nature. « On sait même pas ce que je suis... » Je soupirai doucement. C'était sûr qu'on ne pouvait pas revenir en arrière... J'avais été mordue, j'étais à présent coincée avec cette nouvelle nature. C'était comme ça et pas autrement. « Et comment tu comptes m'aider hein? » Ce n'était pas comme si il s'était montré super présent ces derniers jours. Alors je sais bien qu'il était passé par là et qu'il allait donc pouvoir m'aiguiller mais quand même. Quelque chose me disait qu'une créature n'était pas comme une autre. Je croisai mes bras sur ma poitrine et patientai en attendant de connaître ses réponses.

C'était bien gentil de vouloir m'aider mais encore fallait-il savoir comment. Et encore fallait-il savoir ce que j'étais au juste comme créature. Quel intérêt de vouloir m'aider sans savoir ça? Je n'étais pas une grande connaisseuse du monde surnaturel mais je me doutais qu'une créature n'en valait pas une autre et que les méthodes d'adaptation, de contrôle sur soi-même, devaient être différentes d'un être surnaturel à un autre. Alors avant de songer à m'aider, il fallait peut-être savoir ce que j'étais exactement. « Tu as raison, mais je sais une chose… Tu n’es pas comme moi… Ce que je veux dire, c’est que tu n’es pas un loup… Alors, tu es une autre créature surnaturelle, dans le même genre. Pour ça, il faudra peut-être consulter Chris. » Pardon?! Il était sérieux là?! « Super ton idée Isaac. Attendons donc que Chris rentre, s'il rentre un jour. » Il n'avait pas de nouvelles de lui mais il fallait l'attendre sagement pour savoir ce que j'étais? Après toutes ces années à le fréquenter, il n'avait pas été capable d'apprendre quoi que ce soit sur les créatures? Je soupirai doucement. J'espérais vraiment que Chris allait bien et qu'il allait bientôt rentrer. Et je ne disais pas ça pour savoir quelle créature j'étais mais parce que j'avais vraiment apprécié l'homme qu'il était et que je m'étais liée d'amitié avec lui aussi. Tout simplement. « Sérieusement... Tu serais vraiment pas capable de reconnaître ce qui se cache en moi si... Si j'arrivais à te le montrer? Parce que soyons réalistes: une créature ne va pas forcément apprendre à se contrôler comme une autre. Je veux dire... Si j'ai bien compris, Lydia est une banshee et elle ne va pas fonctionner comme un loup... » Bon, une chose était sûre, je n'étais pas une banshee. J'étais un quelque chose-garou. Normalement. Mais lequel? Est-ce-que tout les garous fonctionnaient de la même façon? Je n'en savais rien... « Je n’ai pas d’idée précise de la façon dont je veux t’aider, mais je veux le faire… Nous trouverons bien des solutions à tout ça… » Je soupirai doucement. On était pas sortis de l'auberge si vous voulez mon avis. « Je suppose que si je te demande par quoi on commence, tu ne sauras pas me répondre? » Je m'arrêtai, me postai en face de lui, et je plongeai mon regard dans le sien en attendant ses réponses.

C'était vraiment gentil de vouloir m'aider mais le mieux serait d'avoir des idées qui m'aideraient réellement. Attendre que Chris rentre n'était pas une mauvaise idée en soi. Au contraire. Mais quand allait-il rentrer?! On ne savait même pas où il était, s'il allait bien, s'il allait rentrer bientôt. Et... Je n'avais pas vraiment le temps d'attendre pour savoir ce que j'étais. Il fallait que je sache maintenant, pas dans dix ans. « Désolé de ne pas être des plus original… Je pensais que c’était une bonne idée… » Je soupirai doucement en m'approchant et en posant ma main sur son bras. J'avais conscience que je ne lui avais pas parlé de la manière la plus sympathique qui soit. « C'est une bonne idée... Mais on sait pas quand il va rentrer et j'ai besoin de savoir maintenant... ça me rend folle de pas savoir ce que je suis Isaac... » Je détournai le regard. C'était vrai quoi... Ne pas savoir quelle créature on est c'était à devenir dingue... Même si la priorité à ce moment précis serait déjà que j'arrive à me contrôler un minimum... Parce qu'honnêtement, ce n'était plus possible pour moi de vivre avec le risque d'avoir des griffes qui sortent au bout de mes doigts ou des crocs qui poussent à la moindre frayeur ou si je commence à stresser pour une raison X ou Y... Je tentai de lui proposer une autre idée, même si elle pouvait paraître nulle à une personne connaissant le monde surnaturel mieux que moi. Je n'avais rien à perdre de toute façon. « Même si tu arrives à me le montrer… À ce que je sache, tu ne peux pas te transformer complètement en peu importe l’animal que tu es. Je ne connais pas beaucoup de personnes capables de le faire… Le contrôle est différent d’une personne à l’autre, mais tu le sais très bien que j’ai passé par le même chemin que toi et j’ai eu la chance d’apprendre à me contrôler rapidement et si les techniques qu’on m’a inculqués peuvent t’aider et bien pourquoi pas! » Je m'assis sur un tronc d'arbre après avoir remis mes cheveux en arrière. Au point où j'en étais, avais-je quelque chose à perdre en suivant ses techniques? Au pire ça ne marcherait pas, au mieux ça marcherait. Pas vrai? Je lui dis que si je lui demandai par quoi on allait commencer il ne saurait pas me répondre. Encore une petite pique pas forcément sympathique, je devais l'avouer. « J’ai ma petite idée, mais je n’ai pas l’impression que tu veux mon aide… Si tu préfères te débrouiller toute seule, dis-le-moi et je vais retourner à la maison. » Je baissai mon regard un instant avant de le relever pour le poser sur le jeune homme. « Non c'est bon... Je t'écoute. Par quoi on commence? » Il disait avoir sa petite idée donc j'étais toute ouïe pour l'écouter, tout simplement. Je restai assise en attendant qu'il m'explique quelle serait la première étape de mon apprentissage.

Ce qui me terrifiait le plus c'était de perdre le contrôle à tout moment. Je marchais dans la rue et mes griffes venaient parce que je m'étais effrayée ou pour je ne savais quelle raison. Et j'avais peur des pleine-lunes... Je ne voulais pas risquer de refaire un carnage comme lors de ma première pleine-lune après ma transformation... Les images des corps que j'avais vu le lendemain à la télé me hantaient... Je savais très bien que c'était moi. Ils parlaient d'un animal sauvage mais j'étais pas idiote. Quel animal sauvage dans ma ville, sérieusement? Un chien enragé peut-être? Je soupirai doucement. Il fallait que j'accepte l'aide d'Isaac. C'était bien pour ça que j'étais venue après tout. Seul lui pouvait m'aider. Lui et Chris. Ils étaient les seuls que je connaissais qui savaient pour le surnaturel, je n'avais personne d'autre vers qui me tourner. « Le contrôle est quelque chose de très important pour les créatures comme toi et moi, et ce, surtout lors des pleines lunes. C’est pourquoi j’avais envie de te partager ce que Derek m’a montré à Boyd, Erica et moi lorsqu’il nous a mordus pour que nous puissions avoir une meilleure vie… Tu dois te trouver une ancre, quelque chose ou quelqu’un en qui te rappelle qui tu es vraiment, lorsque tu n’es pas une créature. » Une ancre? Je voyais pas trop ce qu'il voulait dire par là. Un sentiment? Une personne. Qui pourrait bien me rappeler qui je suis quand je suis pas une créature franchement...? En fait, la réponse était plutôt évidente en y réfléchissant bien. Elle s'imposait. « Prends bien le temps d’y penser! Il reste quelques jours avant la prochaine pleine lune… On pourra se pratiquer à ce moment-là. » C'était lui mon ancre. Les sentiments mélangés que je ressentais pour lui. La colère et la tristesse pour son abandon. Mais aussi l'amour que je pouvais ressentir pour ce beau brun. « Et une fois qu'on pense savoir ce qu'est l'ancre, qu'est-ce-qu'on fait? » Connaître son ancre allait m'empêcher de me transformer et de péter un câble, d'accord. Mais alors quoi? Dés que je sentirais des griffes ou des crocs, je devrais penser à lui et elles disparaîtront? Aussi simplement que ça? « L'ancre, c'est pour m'empêcher de péter un câble c'est ça? Je dois juste penser à cette chose ou personne et tadam, magique? » Je devais avouer que tout ce concept était encore très étranger et inconnu pour moi. « Et si justement je veux provoquer ma transformation, je fais quoi? » D'un coup, je posais plein de questions comme si j'avais peur d'en oublier une par la suite. Mais j'avais besoin de savoir, tant pis si il se sentait submergé par mes questions mais maintenant qu'on en était à là, je devais apprendre aussi vite que possible... Il ne fallait pas que je redevienne incontrôlable. Je supporterais pas de refaire un carnage ou de mettre mes amis en danger à cause de mon incapacité à mon contrôler.

Cela ne semblait plus être aussi sorcier que ça finalement. Il fallait trouver une ancre et se concentrer dessus. Je savais déjà au fond de moi ce que serait mon ancre. Ce serait Isaac. Je le sentais. Je le sentais au plus profond de moi-même parce que je sentais en moi que malgré la colère que je pouvais ressentir pour lui - ou avoir ressentis après qu'il m'ait abandonnée comme il l'avait fait - je l'aimais. Et c'était ça le plus important. Je pressentais que c'était lui qui me rappellerait mon humanité durant une transformation pour éviter que je ne devienne incontrôlable. Je vivais encore avec les horreurs que j'avais commises lors de ma première transformation et j'allais devoir vivre avec durant toute ma vie. Alors non, je n'allais pas permettre que ça se reproduise un jour. « Une fois que tu as trouvé, tu te concentres sur cette personne ou ce sentiment. » J'hochai la tête doucement. Tout ça semblait clair et simple. Mais quelque chose me disait qu'une fois dans la pratique, ce serait nettement plus compliqué. La théorie avait toujours l'air plus simple et quand il s'agissait de la mettre en pratique, ça ne se passait pas souvent comme on l'aurait souhaité. « Ce n’est pas tant magique, mais c’est une bonne base pour le contrôle des créatures garous… Ça ne veut pas dire que cela va être facile. Certaines personnes réussissent du premier coup, d’autres ont besoin plus de temps… » Qu'est-ce-que je disais? La théorie semblait bien plus simple que la pratique dans la majorité des situations.

« Comment ça s'est passé pour toi? Racontes moi ta première transformation et comment t'as fait pour te contrôler. On t'a aidé? » Il me l'avait sûrement raconté quand il m'avait avoué être une créature surnaturelle. Mais j'avais envie de l'entendre me raconter ça à nouveau. Tout me paraissait abstrait en France, je n'avais pas conscience de la réalité des choses. Bien sûr que je le croyais, il me l'avait montré. Mais ce n'était pas la même chose que de le vivre soi-même. Je réalisais qu'en l'entendant me le raconter à nouveau, je le prendrait d'une autre manière, ma vision de ce qu'il avait vécu ne serait plus seulement la vision d'une jeune femme humaine, peut-être naïve et inconsciente du danger qui rôdait autour des humains. Ce serait la vision d'une toute jeune créature. Et ce n'était pas tout à fait la même. Je n'appréhendais plus les choses de la même façon depuis ma transformation, depuis ce que j'avais fait cette nuit-là... Ça m'avait changée... J'avais du mal à expliquer en quoi ça m'avait changée mais ça l'avait fait. On ne pouvait pas sortir indemne d'une telle expérience. Cela vous touchait forcément. Je voulus ensuite savoir comment on faisait pour déclencher le côté garou. « La colère et la douleur sont deux facteurs qui peuvent aider à provoquer ta transformation. » Hum... Deux moteurs qui sont utiles même pour les humains. La peur aussi, était souvent un bon déclencheur. Avec l'adrénaline etc...

« Mais pourquoi veux-tu savoir ça ? » Excellente question. J'hochai légèrement les épaules. « Je ne veux pas juste être bonne à contrôler mon côté surnaturel quand il apparaît. Je veux aussi pouvoir le commander, le faire venir quand j'en aurais besoin. » Je ne voulais pas juste subir mon côté en le contrôlant lors des pleines lunes. Je voulais pouvoir m'en servir quand j'en avais besoin. La colère et la douleur... Difficile. Je n'étais pas fâchée pour le moment. Je levai mon regard vers lui. « Donc, si tu venais à me frapper, la douleur pourrait éventuellement faire resortir mon côté animal? » Je me mis debout face à lui, à quelques pas de distance du jeune homme, mon regard posé sur lui. Je tentais de bien comprendre de quelles façons, par exemple, je pourrais faire venir ce côté qui m'effrayait autant qu'il me fascinait.